Le contrôle technique des deux roues (1) est un sujet très sensible politiquement, à tel point que dans le passé le Gouvernement a déjà reculé au sujet de l’entrée en vigueur de cette mesure.
En effet il résulte de la directive européenne 2014/45 du 3 avril 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques et abrogeant la directive 2009/40/CE que depuis le 1er janvier 2022 il est nécessaire de soumettre à un contrôle technique les véhicules à moteur de deux, trois ou quatre roues de cylindrée supérieure à 125 cm³ sauf pour les Etats qui ont instauré, et notifié à la Commission européenne, des mesures alternatives de sécurité routière basées sur des statistiques de sécurité routière pertinentes.
Alors qu’il est très appliqué à tenir compte des textes européens et même à les appliquer d’une façon plus rigoureuse que nécessaire l’État français n’a pas hésité à ne pas tenir compte de ce délai.
Ainsi ce n’est que pour le 1er janvier 2023 qu’un décret en date du 9 août 2021 a fixé l’entrée en vigueur de cette mesure et encore uniquement pour les véhicules immatriculés avant le 1er janvier 2016. Les autres véhicules devaient se voir appliquer cette mesure entre 2024 et 2026 en fonction de la date d’immatriculation (3).
Ultérieurement à la publication de ce décret le Gouvernement à toutefois fait état de son intention de ne pas appliquer ce contrôle technique. Se contentant de gouverner par voie d’annonce il n’a pas pris le soin de modifier le décret, dont les dispositions sont donc toujours de droit positif. En effet la France sous Macron et le gouvernement Castex ont montré une fâcheuse tendance à confondre les « journaux » et le « journal officiel » préférant gouverner par communiqués de presse qu’avec des règles de droit, voire en se servant des premiers pour malmener ces dernières.
Les associations Respire, Ras-le-Scoot et Paris sans voiture ont saisi le Conseil d’État (4) en référé pour contester le calendrier prévu par ledit décret, dont la tardivité des dates porterait atteinte à l’intérêt public en matière de sécurité routière et de protection des populations contre la pollution de l’air et les nuisances sonores des véhicules.
S’appuyant sur un rapport du Conseil national de la sécurité routière (5) fournis par ces associations le Conseil d’État a estimé que l’absence de contrôle technique augmente les risques d’accident de la route et favorise les nuisances sonores et la pollution.
Le Conseil d’État a estimé que si le Gouvernement a adressé à la Commission européenne le 3 décembre 2021 une note indiquant sa volonté de mettre en place des mesures alternatives de sécurité routière, il n’a pas été en mesure d’établir le contenu exact de ces mesures qui n’ont d’ailleurs pas été mises en œuvre.
Le Conseil d’État a refusé de tenir compte des indications du Gouverment selon lequel l’entrée en vigueur du contrôle technique seulement le 1er janvier 2023 était justifiée par sa volonté de faire accepter cette mesure, ce qui laisse songeur venant d’un Gouvernement qui a mainte fois montré qu’il appliquait de force des mesures non populaires sans rechercher l’acceptation de la population, et par la nécessité de disposer de conditions matérielles pour mettre concretement en place cette mesure. En effet selon le Conseil d’État le calendrier prévu par le décret prévoit une entrée en vigueur progressive selon la date d’immatriculation des véhicules et les mesures concrètes à mettre en œuvre ne justifient par un report au-delà du 1er octobre 2022.
Pour le Conseil d’État il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret et dans son ordonnance rendue en référé le 17 mai 2022 il a a suspendu le report de l’entrée en vigueur de l’obligation de contrôle technique au-dela du 1er octobre 2022.
En pratique il semble que le prix du contrôle technique devraient avoisiner les cinquantes euros et si les points de contrôle ne sont pas connus avec exactitude ils devraient au moins porter sur les organes de sécurité, tels que les freins, les phares, les pneus, les amortisseurs. Le contenu de l’ordonnance pourrait aussi donner à penser que le niveau sonore des pots d’échappement pourrait également être controlé.
Notes de bas de page :
(1) Le terme « deux roues » est en réalité trop réducteur. Sont en effet également concernés, lorsqu’ils ont une puissance de plus de 125 cm³, les scooters à trois roues, et quadricycles à moteur (en pratique les quads et les voitures sans permis), soit les véhicules de catégorie L.
(2) Directive européenne 2014/45 du 3 avril 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques, et abrogeant la directive 2009/40/CE.
(3) Décret n° 2021-1062 du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur.
(4) Conseil d’État, 17 mai 2022, référé, N° 462679
(5) Consultation du rapport du conseil national de la sécurité routière.