Je souhaite Ă©voquer aujourdâhui avec vous deux modifications rĂ©centes de la lĂ©gislation dont les rĂ©sultats peuvent sâavĂ©rer contraires Ă ceux attendus par lâĂtat.
La premiĂšre modification concerne une Ă©volution de la lĂ©gislation concernant lâassurance automobile, notamment la suppression de la carte verte, aussi connue sous la dĂ©nomination attestation dâassurance, et de la vignette, aussi connue sous la dĂ©nomination certificat dâassurance, depuis le 1er avril 2024.
En effet, depuis cette date, les automobilistes et les utilisateurs de deux-roues motorisĂ©s ne sont plus obligĂ©s dâapposer sur leur vĂ©hicule la vignette dâassurance ni de dĂ©tenir la fameuse carte verte, du moins en ce qui concerne les vĂ©hicules soumis Ă obligation dâimmatriculation. Cette mesure vise Ă simplifier les formalitĂ©s administratives et Ă favoriser une approche plus Ă©cologique en rĂ©duisant la consommation de papier.
Cependant, derriĂšre cette apparente avancĂ©e se cache un danger rĂ©el. En dispensant les conducteurs de l’obligation d’afficher une preuve d’assurance sur leur vĂ©hicule, cette mesure risque de favoriser les fraudes et les conduites sans assurance. Auparavant, l’absence ou la pĂ©remption de la vignette d’assurance sur le pare-brise permettait aux forces de l’ordre de dĂ©tecter facilement un dĂ©faut d’assurance, mĂȘme lors dâune situation ne correspondant pas Ă un contrĂŽle routier portant sur l’assurance, offrant ainsi une protection accrue contre la conduite non assurĂ©e.
DĂ©sormais, la vĂ©rification de l’assurance nĂ©cessite l’utilisation d’une tablette pour consulter le fichier des vĂ©hicules assurĂ©s, rendant le processus plus complexe et moins accessible lors des contrĂŽles sur le terrain. Cette Ă©volution pourrait donc conduire Ă une augmentation des conducteurs roulant sans assurance, avec les consĂ©quences potentielles que cela implique en termes de sĂ©curitĂ© routiĂšre et de protection des usagers de la route. Cela est dâautant plus grave que dĂ©jĂ le fait de rouler sans assurance nâest pas rare.
Une autre difficultĂ© concernant cette modification peut se produire en cas dâaccident de la circulation. En effet, les donnĂ©es spĂ©cifiques au contrat dâassurance sont mentionnĂ©es sur lâattestation dâassurance. Il est Ă craindre que suite Ă lâabsence dâobligation de dĂ©tenir ce document, le fait de remplir un constat amiable dâaccident devienne plus complexe en raison de lâabsence de ces donnĂ©es si le conducteur du vĂ©hicule nâa pas pris le soin de conserver lâattestation dâassurance avec lui. Nous vous conseillons donc de lâavoir avec vous. Ă dĂ©faut pour les nouveaux contrats dâassurance, vous pouvez utiliser le mĂ©mo vĂ©hicule assurĂ© que doit vous remettre lâassurance. Encore faut-il lĂ aussi avoir ce document sur soi.
La seconde modification que je souhaitais Ă©voquer concerne lâimportation de cigarettes depuis un autre pays membre de lâUnion EuropĂ©enne. JusquâĂ prĂ©sent, une limite de 200 cigarettes par personne, soit une cartouche, sâappliquait. Depuis le 29 mars, cette limite ne sâapplique plus, un dĂ©cret venant de procĂ©der Ă sa suppression.
Ceci peut avoir deux conséquences négatives.
La premiĂšre rĂ©side dans un dĂ©veloppement du trafic de cigarettes. Encore plus quâauparavant, des personnes ne vont probablement pas hĂ©siter Ă acquĂ©rir des cigarettes dans un pays frontalier pour les revendre ensuite en France, en dĂ©gageant au passage un bĂ©nĂ©fice.
La seconde rĂ©side dans une perte dâattractivitĂ© des buralistes, qui vont se trouver face Ă une guerre des prix Ă laquelle ils ne vont pas pouvoir faire face. Ainsi, leurs chiffres dâaffaires pourraient baisser et certains risquent dâĂȘtre contraints de mettre la clĂ© sous la porte.
Cette modification fait suite Ă une demande effectuĂ©e par un particulier Ă Elisabeth Borne en janvier 2023, qui lui demandait dâaligner les rĂšgles françaises sur les rĂšgles europĂ©ennes, qui limitent Ă quatre le nombre de cartouches pouvant ĂȘtre importĂ©es dâun autre pays de lâUnion EuropĂ©enne. Le 29 septembre 2023, le Conseil dâĂtat avait donnĂ© au gouvernement un dĂ©lai de 6 mois pour procĂ©der Ă cette modification. On peut ainsi ĂȘtre surpris du texte fruit du travail du gouvernement qui ne comporte aucune limite alors que le droit europĂ©en fixe une limite de quatre cartouches de cigarettes.
Cette limite de quatre cartouches va-t-elle sâappliquer dâune façon plus discrĂšte ? Ce nâest pas totalement exclu car ce dĂ©cret prĂ©cise comment dĂ©terminer si lâimportation est faite pour un usage personnel. Parmi les diffĂ©rents critĂšres listĂ©s pour ce faire par ce dĂ©cret se trouve notamment la quantitĂ© des produits. Ainsi, une limite quantitative mais non chiffrĂ©e est rĂ©introduite concernant lâimportation des cigarettes, ce qui laisse une marge dâincertitude.