« Ne faites jamais confiance à la justice de votre pays », tel est le titre adopté par Claude Butin pour son ouvrage éponyme, ce qui annonce nécessairement un regard défavorable sur la justice actuelle de notre pays.
Claude Butin sait de quoi il parle, car loin d’avoir un œil extérieur, il a participé de l’intérieur au fonctionnement de la justice, depuis son premier poste à Mayotte jusqu’à sa fonction de vice-président du tribunal de grande instance à Rouen. Dans ce livre, il nous explique son parcours personnel et professionnel, aussi bien avant d’entrer dans la magistrature que pendant la période relative à l’exercice de ses fonctions dans le monde de la justice. Au fil des pages, on découvre un monde de la justice particulièrement décevant, ainsi que plusieurs acteurs de cet univers dont les traits caractéristiques sont extrêmement négatifs.
C’est avec cet ouvrage que j’ai décidé de poursuivre la série « J’ai lu un livre ». En débutant la lecture de ce livre, j’ai eu la surprise de découvrir une préface de Philippe Bilger, une personne bien connue dans le monde des médias. S’il ne partage pas la totalité des propos contenus dans ce livre, on comprend, à la lecture de cette préface, qu’il a apprécié la découverte de son contenu.
Le livre de Claude Butin présente une dimension autobiographique, puisque son déroulement suit le parcours personnel et professionnel de son auteur. J’ai pris connaissance de certains commentaires qui regrettent cette dimension, les commentateurs affirmant qu’ils auraient souhaité avoir une vision plus large de la justice avec des exemples concrets qui ne seraient pas liés au vécu de Claude Butin. Il faut donc être conscient de cet aspect-là qui peut gêner une partie du public qui aimerait une approche plus générale de la justice. Les personnes qui désireraient lire un essai sur les dysfonctionnements du monde de la justice appréciés d’une façon générale et impersonnelle seront déçues. Cet ouvrage constitue plus une autobiographie avec des anecdotes personnelles qui peuvent, dans ces conditions précises, illustrer des dysfonctionnements de la justice.
Néanmoins, les indications de Claude Butin sur le fonctionnement de la justice résultent de son expérience professionnelle et constituent ainsi des exemples concrets reposant certes sur son seul vécu. Nous avons ainsi un témoignage de première main qui nous invite à nous interroger sérieusement sur la qualité de notre justice et sur les moyens pour remédier à son état actuel. Je vais faire par la suite des observations pour améliorer notre justice, en me basant sur des indications initialement faites par Claude Butin et en apportant ensuite mes propres réflexions.
On apprend à la lecture de cet ouvrage que pour devenir juge, Claude Butin n’a pas suivi le parcours classique qui consiste en l’observation d’une période de formation à l’école nationale de la magistrature. Il a exercé avant de devenir juge plusieurs professions qui n’ont rien à voir avec le droit. Par la suite, il est devenu avocat et enfin il est rentré dans la magistrature.
J’apprécie ce type de cheminement dans la vie avant de devenir juge. J’estime que ceux qui rendent la justice doivent connaître d’autres expériences professionnelles avant de pouvoir remplir correctement la délicate mission que l’État leur confie, au lieu de suivre la voie royale de l’École nationale de la magistrature qui constitue le chemin d’accès le plus fréquent à cette profession. Il me semble même qu’ils devraient en baver un peu dans la vie, souffrir comme beaucoup d’entre nous. Car ceux dont les expériences professionnelles se limitent à jouir de privilèges ne peuvent alors se confronter à la réalité du commun des mortels. En cela, j’estime nécessaire de modifier les voies d’accès à la magistrature en imposant l’exercice antérieur d’autres professions. Je pense aussi qu’il est requis de supprimer l’École nationale de la magistrature, dont l’échec est patent, tant la magistrature nous montre bien trop souvent son insuffisance professionnelle et son parti pris intellectuel pour ne pas dire idéologique.
La magistrature doit à mon sens faire l’objet de modifications importantes dans ses modalités d’accès et dans ses méthodes de formation.
Mais il faut aller encore plus loin. Il est intéressant que cet ouvrage soit écrit de la main d’un homme alors que la magistrature est un corps qui se féminise de plus en plus. Au 1er janvier 2023, 71 % des juges étaient des femmes, les hommes n’étant que 29 %. Cette quasi-omniprésence des femmes dans le monde de la justice s’avère toutefois insuffisante aux yeux des femmes qui estiment toujours être discriminées. Celles-ci regrettent notamment de ne pas accéder suffisamment aux postes les plus élevés et arguent d’une mobilité géographique qui bénéficieraient plus facilement aux hommes qui accepteraient plus aisément de vivre seuls sans leurs enfants pendant les semaines de travail.
Quelques années plus tôt, le ministère de la justice s’était engagé à favoriser les femmes dans le monde de la justice, notamment en ce qui concerne les demandes toujours d’actualité que nous venons d’évoquer.
Ainsi, ce n’est pas la compétence qui est prise en considération dans le monde de la justice, celles-ci s’effaçant devant la nature sexuelle de l’individu. Une telle situation, qui traduit un manque de sérieux évident, doit être corrigée. Seule la compétence d’une personne doit rentrer en ligne de compte pour l’accès à une profession et pour une évolution de carrière.
J’aimerais maintenant aborder un autre point, m’inspirant des propos de Claude Butin et les développant avec ma propre analyse. Dans son livre, Claude Butin note que lorsque le juge rend la justice, il restitue ce qu’il a reçu en héritage, autrement dit un ensemble de valeurs. Il envisage le risque qu’un juge soit mal intentionné ou corrompu et rende de mauvaises décisions. Ceci peut influencer la perception des justiciables envers la justice, lesquels peuvent alors ne plus avoir confiance en elle. Ainsi, Claude Butin aborde l’impartialité et la neutralité du juge.
Un juge, à mon sens, ne peut jamais être totalement neutre et impartial, notions dont on peut d’ailleurs se demander si elles sont similaires ou distinctes. Il n’est pas une page blanche sur laquelle on va écrire un jugement. Le juge a son histoire, son vécu, ses expériences, ses opinions, ses convictions, et pire que tout, son idéologie.
Je dois sur ce point faire un rappel historique. Il faut en effet savoir que le syndicat de la magistrature avait lors de sa création le slogan suivant : « tout jugement est un acte politique ». Si ce slogan semble avoir disparu, son esprit est visiblement resté, tant l’actualité nous montre une multitude de décisions qui ne peuvent s’expliquer que par la volonté de faire triompher une orientation politique. Car les juges ont leur calendrier qui n’est pas celui des justiciables ni celui de l’intérêt commun.
Nous nous trouvons aujourd’hui face à un véritable gouvernement des juges, même si ceci pourrait être affiné en fonction des juridictions en cause. Certaines décisions trouvent leurs essences non pas dans la règle de droit mais dans une idéologie, la règle de droit ne devenant qu’un habillage juridique destiné à dissimuler la cause véritable.
La justice est dans un tel état en France que seul un véritable électrochoc pourrait éventuellement rétablir un semblant de confiance en elle. J’ai déjà indiqué présentement plusieurs mesures qu’il faudrait selon moi adopter. Je pense qu’il serait aussi nécessaire d’envisager les mesures suivantes, sur lesquelles vos opinions sont les bienvenues :
– les orientations politiques et idéologiques des juges devraient être connues,
– les juges ne devraient accéder à la profession que par une élection, pour une fonction qui aurait une durée limitée. Une profession de foi devrait indiquer les orientations politiques et idéologiques des juges. Des conditions de diplômes, d’âge et d’exercice antérieur d’autres professions, pendant une longue période, doivent être exigées.
– en parallèle l’école nationale de la magistrature doit être supprimé et la prise en considération de la nature sexuelle des individus disparaîtrait,
– la responsabilité des juges doit être accrue.
– le nom des juges doit être connu.
– le droit de se syndiquer doit être interdit.
– le syndicat de la magistrature doit être supprimé.
J’ai bien conscience que ces propositions sont susceptibles de provoquer un tollé. Il reste une autre solution. Ne rien changer, et rien ne changera.
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