Airbnb : la France à la poursuite de New York

Publié le 14 septembre 2024
Mis à jour le 04 novembre 2024

L’actualité met en lumière la situation d’Airbnb à New York, où des mesures strictes ont été mises en place, et en France, où les hôteliers continuent de dénoncer la plateforme pour concurrence déloyale. Que peut-on apprendre de l’exemple américain pour améliorer la situation en France ?

1. New York et sa régulation stricte contre Airbnb

a. Evolution de la réglementation à New York

Un an après l’adoption de l’une des régulations les plus strictes au monde concernant Airbnb, New York a fortement limité les locations touristiques de courte durée. Depuis septembre 2023, les locations touristiques de moins de 30 jours sont interdites. Cette mesure visait à répondre à plusieurs problématiques, notamment la flambée des loyers et la pénurie de logements abordables. Avant cette législation, New York, à l’instar de nombreuses grandes villes, voyait une explosion des annonces Airbnb, ce qui exacerbait la crise du logement.

b. Réserve sur les données

La presse relaie des données de l’évolution du marché immobilier à New York. Notons que la première étude de ces données provient d’Airbnb, et doit donc être prise avec prudence, la presse semblant se contenter de citer cette étude sans apport intellectuel réel de sa part.

c. Limitation de l’offre Airbnb

En se basant sur les informations diffusée par la presse depuis l’interdiction des locations de moins de 30 jours, le nombre d’annonces Airbnb a chuté de 82 %, passant de 22 246 à environ 4 000. Cette mesure a ainsi permis de limiter l’offre Airbnb. Il reste à voir si les résultats observés sur le marché de la location immobilière sont ceux attendus.

d. Hausse des prix hôteliers et des loyers

L’une des conséquences directes de cette interdiction a été une augmentation du taux d’occupation des hôtels, avec un taux record de 82 %, contre une moyenne de 63 % pour le reste des États-Unis. Il est à noter que 20 % des hôtels de la ville accueillent des migrants, ce qui impacte nécessairement le taux d’occupation des hôtels, pour cette raison nous réduisons le taux d’occupation à 77,5 % (1). Simultanément à l’augmentation du taux d’occupation des hôtels, les prix dans les hôtels de New York ont grimpé. Le prix moyen des nuitées a bondi de 7,4 %, dépassant les 300 $ par nuit, bien au-dessus de la hausse nationale, limitée à 2,1 %.

Le taux de logements vacants a atteint son plus bas niveau depuis 50 ans, à 1,4 %, et les loyers ont grimpé. En juin dernier, les loyers ont progressé de 2,4 %, avec un loyer médian à Manhattan atteignant pour la première fois 5 000 $ par mois.

Ces évolutions montrent que les consommateurs sont défavorisés par les choix effectués par la ville de New York, contrairement aux hôteliers et aux bailleurs.

e. Baisse de revenus pour les anciens hôtes Airbnb

Les anciens hôtes d’Airbnb ont également été impactés négativement. Beaucoup d’entre eux comptaient sur les revenus générés par la plateforme pour subvenir à leurs besoins ou pour rembourser leurs crédits immobiliers, des objectifs plus difficiles à atteindre avec les nouvelles règles.

2. La France s’aligne progressivement sur New York

a. Situation en France

En France, la situation n’est pas encore la même qu’à New York, mais elle pourrait progressivement s’en rapprocher. Les règles concernant la location meublée touristique de courte durée ont été durcies, avec l’introduction d’un nombre maximum de jours de location, la déclaration en mairie et l’obtention d’un numéro d’enregistrement. À ces règles nationales peuvent s’ajouter des régulations locales encore plus strictes.

Ce mouvement s’inscrit dans la tendance générale observée en Europe, avec des villes comme Barcelone qui ont décidé de supprimer purement et simplement ce type de location.

À ces décisions politiques s’ajoutent plusieurs actions en justice contre Airbnb, dont certaines sont toujours en délibéré devant les tribunaux de commerce de Paris et de Lisieux. Ces actions introduites par l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie et par des hôteliers individuels visent principalement à obtenir la condamnation d’Airbnb pour concurrence déloyale.

Ces actions montrent que les hôteliers souhaiteraient voir l’activité d’Airbnb limitée ou supprimée.

b. Leçons à tirer de l’exemple de New York pour la France

Si l’on se base sur l’exemple de New York, une restriction de l’activité d’Airbnb pourrait ne pas avoir les effets escomptés.

Elle serait susceptible d’entraîner une hausse des prix des nuitées hôtelières et une augmentation du taux d’occupation des hôtels, des effets certes bénéfiques pour les hôteliers mais défavorables pour les consommateurs.

Un durcissement des règles applicables à Airbnb pourrait aussi entraîner une hausse des loyers pour les locations classiques, tout en pénalisant les petits propriétaires qui comptent sur Airbnb pour générer des revenus supplémentaires.

Pour limiter ces risques toute évolution future des règles encadrant les locations meublées touristiques devrait être précédée d’une étude approfondie du marché immobilier et hôtelier, afin de s’assurer de l’impact des règles précédemment établies, et suivie par une autre étude pour mesurer les effets des nouvelles restrictions.

En l’état, et à la lumière des résultats observés à New York, résoudre la crise immobilière ne peut se limiter à des mesures contre Airbnb, cela pourrait même s’avérer contre-productif même si des effets positifs sur d’autres problèmes, nous pensons en particulier aux nuisances de voisinage causées par certains locataires Airbnb pourraient exister.

Note de bas de page :

(1) Calcul du taux d’occupation des hôtels sans tenir compte des 20 % de ceux qui accueillent des migrants :

1. Données de base :

◦ Taux d’occupation global (avec les migrants) : 82 %

◦ 20 % des hôtels accueillent des migrants.

2. Calculer la répartition des hôtels :

◦ Si 20 % des hôtels accueillent des migrants, alors 80 % des hôtels n’en accueillent pas.

3. Établir une hypothèse : Le taux d’occupation des hôtels qui accueillent des migrants pourrait être proche de 100 %, étant donné qu’ils sont réquisitionnés pour l’hébergement, mais cela peut varier. Il faudra donc faire l’hypothèse d’un taux d’occupation élevé, par exemple 100 %, dans les hôtels accueillant des migrants.

4. Formule à utiliser : On peut calculer le taux d’occupation des 80 % d’hôtels sans migrants à l’aide de la moyenne pondérée.

La formule serait :

Tglobal​=(p1​×T1​)+(p2​×T2​)

Où :

◦ Tglobal​=82% (taux global d’occupation)

◦ p1​=0,80 (80 % des hôtels sans migrants)

◦ p2​=0,20 (20 % des hôtels avec migrants)

◦ T1​ = taux d’occupation des hôtels sans migrants (ce que nous cherchons)

◦ T2​ = taux d’occupation des hôtels avec migrants (qu’on suppose à 100 %)

5. Reformuler la formule pour résoudre T1​ (le taux d’occupation des hôtels sans migrants) :

82=(0,80×T1​)+(0,20×100)

Calcul pour trouver T1 (cf code python ci-dessous)​.

Le taux d’occupation des hôtels sans migrants à New York serait de 77,5 %, en supposant que les hôtels accueillant des migrants ont un taux d’occupation de 100 %. ​

Code Python
# Données
T_global = 82 # taux d'occupation global en %
p1 = 0.80 # proportion des hôtels sans migrants
p2 = 0.20 # proportion des hôtels avec migrants
T2 = 100 # taux d'occupation des hôtels avec migrants en %
# Calcul du taux d'occupation des hôtels sans migrants (T1)
T1 = (T_global - (p2 * T2)) / p1
T1

Résultats 77,5

Liens vers les sources :

Source 1.

Source 2.

Source 3.

Source 4.

Source 5.

Source 6.