Je réagis aujourd’hui à un article publié sur le site madmoizelle.com, publication dont le contenu cible le tiktokeur Abrège Frère d’une façon non ambiguë puisque son titre s’intitule « Abrège frère : des Tiktokeuses dénoncent cette tendance aux relents misogynes ».
J’ai déjà évoqué antérieurement cette personne. Abrège Frère rencontre un succès très important sur le réseau social TikTok. Il s’est spécialisé dans le fait de résumer de façon très brève des vidéos diffusées par d’autres personnes sur ce réseau social.
Dans son article, le site Madmoizelle, prise ici en la personne d’une certaine Christelle Murhula, mentionne que plusieurs tiktokeuses ont dénoncé les dérives de ce concept et ont souligné qu’il écourtait majoritairement des vidéos de femmes, provoquant des vagues de cyberharcèlement contre elles, des personnes allant poster des propos désobligeants sous les vidéos qui ont été raccourcies.
Il existe en conséquence deux phénomènes différents, l’un portant sur les actes d’Abrège Frère lui-même, l’autre portant sur des actes d’autres personnes.
Les actes des personnes qui postent des commentaires déplacés sous les vidéos qui ont été raccourcies ont été condamnés par Abrège Frère dans un article et une vidéo consultables sur le site leparisien.fr depuis les derniers jours du mois de février 2024.
Les actes d’Abrège Frère doivent eux être traités différemment. Selon Madmoizelle, on se trouverait en présence d’actes misogynes et l’article cite une certaine Chloé pour étayer cette prise de position, en reprenant les termes suivants de cette personne : « parmi les 59 vidéos que le créateur français passe au crible, 45 étaient incarnées par des femmes (…) j’adore l’humour, hein, mais un homme qui dit à une femme d’abréger, avec condescendance, et résume un propos à sa place… purée… mais attendez je jurerais que ça correspond à un concept féministe hyper important… (…) le mansplaining »
On remarquera dans ces quelques lignes un usage du français approximatif (les mots « hein », « purée » pouvaient être évités), accompagné par l’emploi d’un terme d’origine anglaise avec une utilisation erronée et une mauvaise compréhension des faits.
Les mots ont un sens et selon le dictionnaire Larousse, le terme misogyne peut être défini ainsi : « qui éprouve du mépris, voire de la haine, pour les femmes ; qui témoigne de ce mépris ».
Or il ne semble pas y avoir dans les actes d’Abrège Frère des éléments qui confirmeraient une attitude misogyne ainsi définie.
Certaines personnes pourraient se raccrocher à l’espoir de voir une telle attitude dans le fait que parmi 59 vidéos raccourcies, 45 étaient des femmes. Je n’ai pas vérifié le nombre mais considérons qu’il est exact.
Cette présence d’un nombre plus élevé de femmes que d’hommes peut s’expliquer d’autres façons que par de la misogynie.
En particulier, on peut penser qu’Abrège Frère visionne tout simplement plus de vidéos produites par des femmes que par des hommes. Cela semble possible si l’on en croit Wizishop qui affirme qu’en France en 2023 il y a plus d’utilisateurs femmes que d’hommes sur TikTok et même si la proportion était différente, il pourrait s’être abonné à plus de comptes de femmes que d’hommes.
Cela peut aussi s’expliquer par le fait que sur les vidéos qu’il a visionnées, celles qui étaient les plus propices à être raccourcies étaient objectivement des vidéos de femmes, en raison d’un manque de qualité.
D’une façon générale, que ce soit des vidéos d’hommes ou de femmes, pour ouvrir droit à rémunération, les vidéos doivent durer plus d’une minute. Il en résulte, en présence d’un contenu dont l’exposé devrait être rapide et inférieur à une minute, l’existence d’une tendance à étirer ce contenu en lui ajoutant des éléments accessoires peu enrichissants, pour parvenir à dépasser ce plancher d’une minute. Là encore, en raison de la présence d’un nombre plus élevé de femmes que d’hommes sur la plateforme, on ne peut pas exclure qu’au final ce phénomène concerne plus de vidéos de femmes que de vidéos d’hommes.
Concernant l’usage de l’anglicisme à l’encontre d’Abrège Frère, il semble lui aussi employé d’une façon bien légère. Selon le wiktionnaire, « le mansplaining consiste, pour un homme, à expliquer quelque chose à une femme en supposant d’emblée qu’il est le détenteur du savoir et qu’elle est ignorante, alors que le contraire est vrai ». Il n’y a là visiblement aucun rapport avec le fait de raccourcir une vidéo. Je n’ai pas vu Abrège Frère expliquer à qui que ce soit qu’il détenait un savoir particulier que d’autres personnes n’auraient pas et la fin de la définition n’est pas respectée non plus pour permettre à celle-ci de s’appliquer présentement.
Je ne connais pas personnellement Abrège Frère et je ne peux dire s’il est dans sa vie de tous les jours misogyne ou non. Mais en ce qui concerne les actes qui lui sont reprochés sur TikTok, cette qualification me semble erronée. Je note d’ailleurs que certains commentaires relatifs à cet article sont plus pondérés que l’article lui-même.
Je remarque par contre qu’une véritable levée de boucliers a été effectuée à son encontre, par de nombreuses personnes et d’une façon anormale, ainsi accuser quelqu’un d’être misogyne sans que cela corresponde à la réalité est, au minimum, anormal.
Je me demande si des réactions aussi violentes se seraient produites contre une femme. Cette levée de boucliers et cette accusation ne pourraient-elles pas s’expliquer par le fait qu’Abrège Frère est un homme ? Selon le Wiktionnaire, le sexisme est défini comme une attitude hostile à l’égard des personnes de sexe opposé. Ainsi Abrège Frère n’aurait-il pas été victime de sexisme ? Peut-être même y aurait-il dans l’air du harcèlement en raison de la multiplication d’actes à son encontre., si l’on s’en tient à la définition du harcèlement moral selon le dictionnaire Larousse : « agissements malveillants et répétés à l’égard d’autrui, susceptibles notamment d’altérer sa santé physique ou mentale, de porter atteinte à ses droits ou à son avenir professionnel ».
Il est également possible de se demander si certaines TikTokeuses dont des vidéos ont été raccourcies n’auraient pas vu une baisse des statistiques relatives aux visionnages de leurs vidéos. En effet à quoi bon voir une vidéo longue pas forcément intéressante alors que l’essentiel du message est contenu dans la vidéo plus courte d’Abrège Frère. Cette diminution des visionnages étant susceptible d’entraîner une baisse des rémunérations, les cris d’orfraies pourraient être motivés en réalité par un seul souci financier.
Plutôt que de s’enliser dans des débats stériles et des accusations infondées de misogynie, il serait plus constructif pour toutes les parties impliquées de considérer une approche plus positive et proactive. Plutôt que de critiquer Abrège Frère pour ses choix de vidéos à raccourcir, nous pourrions collectivement nous engager dans une démarche visant à produire des contenus de meilleure qualité et plus enrichissants sur les plateformes telles que TikTok.
Le principe de raccourcir une vidéo repose sur la suppression du contenu superflu, et cette pratique devrait en fait inciter les créateurs à être plus créatifs et enrichissants dans leurs messages. Plutôt que de voir cela comme une menace ou une forme de misogynie, nous pourrions le considérer comme une opportunité d’amélioration et d’innovation dans le domaine de la création de contenu en ligne.
En encourageant la diversité, la créativité et la qualité dans nos productions, nous contribuons à enrichir l’expérience des utilisateurs et à élever le niveau général de ce qui est proposé sur les plateformes numériques. Plutôt que de chercher des boucs émissaires, concentrons-nous sur la création d’un environnement en ligne plus stimulant pour tous.