Les avancées en matière de caméras de surveillance augmentées par l’intelligence artificielle (IA) transforment notre approche de la sécurité. D’abord expérimentées lors des JO 2024, ces caméras dotées d’algorithmes de détection se déploient désormais bien au-delà de l’espace public. Leur extension vers les commerces de détail, en particulier les supermarchés et hypermarchés, soulève des questions cruciales, mêlant sécurité et respect des libertés individuelles.
Table des matières
1. La transition des caméras IA de l’espace public aux magasins
Les Jeux olympiques de Paris 2024 ont servi de laboratoire pour les technologies de surveillance basées sur des algorithmes. Bien qu’initialement annoncée comme temporaire, la vidéosurveillance algorithmique déployée dans les espaces publics pendant cet événement pourrait perdurer. En effet, le ministère de l’Intérieur, enthousiaste face aux résultats, envisage de généraliser cette technologie pour assurer une sécurité renforcée. Les critiques, notamment de la part des associations de défense des droits, ont pourtant alerté sur le risque d’une surveillance étendue.
L’extension de cette technologie vers les commerces marque un tournant. D’un dispositif sécuritaire destiné aux rues et lieux publics, elle passe maintenant dans les grandes surfaces, qui se heurtent à un problème de vol à l’étalage important. Des magasins comme les supermarchés et hypermarchés trouvent en ces caméras un moyen de réduire les pertes et de renforcer la sécurité. Avec des capacités de détection avancées, ces caméras peuvent repérer des comportements suspects et alerter le personnel en temps réel, limitant ainsi les risques de vol et optimisant les coûts de sécurité.
2. Pourquoi les magasins adoptent la vidéosurveillance algorithmique
Pour les commerces, en particulier les grandes surfaces, le vol à l’étalage représente un coût élevé. Avec des pertes pouvant atteindre des centaines de milliers d’euros par an, les détaillants voient dans la vidéosurveillance algorithmique une solution économique et pratique. Grâce à des alertes en temps réel, les comportements suspects, tels que le déplacement d’articles dans un sac ou la dissimulation de produits, sont immédiatement repérés. Certains gérants de supermarchés affirment avoir réduit leurs pertes de 60 % après l’installation de ces systèmes.
Les magasins utilisent ces caméras aussi pour optimiser leurs ressources humaines. Là où plusieurs agents de sécurité étaient autrefois nécessaires, une caméra IA peut accomplir une partie de ce travail, libérant du personnel pour des tâches plus centrées sur l’expérience client. Par exemple, certains responsables de magasin rapportent qu’après deux ou trois interventions réussies, les voleurs sont dissuadés de revenir, renforçant la sécurité de manière durable.
3. Une question de sécurité, mais à quel prix pour les libertés individuelles ?
La technologie de surveillance algorithmique, bien qu’encadrée par le RGPD et la CNIL, n’en soulève pas moins des interrogations sur les droits des individus. En France, le législateur impose que tout usage de vidéosurveillance soit proportionnel et respectueux des libertés publiques. Les clients peuvent par ailleurs refuser d’être filmés par ces caméras intelligentes, bien que cela ne garantisse pas leur anonymat total, car les agents de sécurité redoublent souvent de vigilance envers ceux qui refusent la surveillance.
Les critiques rappellent que le passage de la surveillance des espaces publics aux magasins introduit de nouvelles questions : dans quelle mesure cette technologie peut-elle s’immiscer dans notre vie privée sous couvert de protection des biens ? D’autres redoutent une banalisation de la surveillance, qu’elle soit perçue comme normale dans nos vies quotidiennes. Ce débat, qui devrait se poursuivre, aura une importance capitale dans les années à venir.
4. Protection des hypermarchés contre la société mais qui protège la société contre les hypermarchés ?
L’actualité autour de l’implantation des caméras IA dans les hypermarchés soulève des questions sur les impacts plus larges de ces espaces commerciaux sur la société.
En effet, souvent perçus comme bénéfiques pour l’économie, les hypermarchés sont pourtant critiqués pour leur impact négatif sur l’économie nationale et locale : concentration des richesses entre quelques mains, prolifération de grands centres commerciaux, destruction d’emplois dans les petits commerces, baisse de la qualité des produits, et incitations récentes à recourir à des modes de paiement dématérialisés discutables. Pour en savoir plus, consultez nos articles détaillant les effets néfastes de l’expansion des grandes surfaces : limitation de la diversité culturelle, alimentation de faible qualité pour les animaux, volonté d’introduire le paiement par la paume de la main, stretchflation, destruction des talents et des compétences, et impact sur le paysage.
Les espaces commerciaux anonymes et inhumains que constituent les hypermarchés en France se sont développés avec une attitude des autorités, notamment des commissions départementales d’aménagement commercial, qui semble conciliatrice. Un examen plus rigoureux aurait pu permettre une meilleure préservation de la concurrence et de l’environnement. À voir les immenses zones commerciales qui enlaidissent nos villes et leurs périphéries, force est de constater qu’elles ont failli dans l’exercice de leurs missions.
5. Produits recommandés sur la grande distribution
Pour approfondir votre compréhension des enjeux de la grande distribution, voici une sélection d’ouvrages pertinents disponibles sur Amazon.
• Carrefour, la grande arnaque, de Jérôme Coulombel.
• Enquête sur Michel-Edouard Leclerc, de Magali Picard.
• Viande : Et si vous saviez…: Un boucher de la grande distribution parle, Laurent Richier, VA Editions, 2022.
• 418 milliards: la fraude de la grande distribution avec la complicité des élus et de l’administration, Martine Donnette, Studios Talma, 2021.
6. En route vers une surveillance généralisée ?
Alors que les hypermarchés intensifient leur recours à l’intelligence artificielle, cette tendance soulève des préoccupations : allons-nous vers une surveillance généralisée, omniprésente ? Le rapport final du comité d’évaluation du gouvernement, attendu d’ici fin décembre, pourrait bien ouvrir la voie à une légalisation accrue de ces technologies. Face à une popularité croissante auprès des gérants de commerces et au soutien des autorités, il n’est pas exclu que ces systèmes intelligents deviennent la norme.
7. Points à retenir
• Les caméras IA évoluent des espaces publics vers les supermarchés et hypermarchés, suscitant des questions de sécurité et de libertés individuelles.
• La vidéosurveillance algorithmique est utilisée pour lutter contre le vol à l’étalage et optimiser les ressources humaines dans les commerces.
• Les grandes surfaces sont critiquées pour leur impact négatif sur l’économie locale et nationale, notamment la concentration des richesses et la destruction d’emplois.
• La technologie de surveillance, bien que réglementée, pose des défis en matière de respect de la vie privée.
• Les consommateurs peuvent refuser d’être filmés, mais cela ne garantit pas leur anonymat.
• L’expansion des hypermarchés contribue à une banalisation de la surveillance dans la vie quotidienne.
• Les préoccupations concernant une possible surveillance généralisée augmentent alors que les autorités envisagent de légaliser davantage ces technologies.