Il me semble intéressant de participer à la culture juridique en mettant en avant des livres et des auteurs. Ces auteurs peuvent être des juristes ou de personnes qui ne répondent pas nécessairement à cette qualification mais dont les réflexions ont porté sur le droit.
Aujourd’hui j’ai souhaité faire plus particulièrement découvrir, ou rappeler aux souvenirs d’une partie des lecteurs, trois auteurs et un livre de chacun de ces auteurs. Ces livres ne sont pas récents, d’ailleurs les auteurs de ceux-ci sont tous décédés. Les personnes qui recherchent une position du droit positif sur des problèmes juridiques actuels ne trouveront pas ce type d’information dans ces ouvrages. Mais ce sont des ouvrages importants qui ont marqué leur époque et qu’il est intéressant pour un juriste de connaître.
Le premier ouvrage que je souhaite évoquer avec vous est en réalité une thèse de doctorat. Cette thèse a été écrite pendant la seconde guerre mondiale alors que son auteur était dans le maquis. Il s’agit de la thèse d’ Henri Motulsky. Cette thèse a été publiée en 1948. Elle est intitulée « Principes d’une réalisation méthodique du droit privé » et elle porte le sous-titre « La théorie des éléments générateurs des droits subjectifs ».
Avec cette thèse Henri Motulsky a construit une véritable théorie du procès. A tel point que le titre de cette thèse est un peu trompeur car trop réducteur. Ce titre fait référence au droit privé alors que les principes que cette thèse dégage peuvent s’appliquer également au procès administratif.
Avec cette thèse Henri Motulsky détermine la répartition des fonctions des parties et du juge dans le procès. Cette conception rappelle fortement l’adage « da mihi factum, dabo tibi jus », autrement dit « donne moi les faits, je te donnerais le droit ». Pour Henri Motulsky il appartient aux parties d’apporter les faits du litige tandis que ce qui relève du droit doit être l’apanage du juge. Cette répartition des fonctions doit être respectée mais il faut aussi respecter d’autres règles de droit essentielles pour Henri Motulsky. En effet, celui-ci met un point particulier sur le respect des droits de la défense et du principe du contradictoire.
Henri Motulsky n’est pas nécessairement très connu. Pourtant il a eu un apport important au niveau du droit. Déjà auprès de plusieurs générations d’étudiants car ceux-ci ont pris connaissance de cette thèse et d’autres ouvrages d’Henri Motulsky. Mais il a aussi eu une influence sur le code de procédure civile car il a été un membre éminent de la commission de réforme de la procédure civile et ses idées ont été dans une grande mesure retranscrites dans le nouveau code de procédure civile de 1975.
Le second ouvrage que je veux vous présenter s’intitule « Flexible Droit ». Son contenu a été rédigé par Jean Carbonnier. Jean Carbonnier est surtout connu pour ses ouvrages relatifs au droit civil. Mais ce juriste s’est aussi intéressé à la sociologique droit. « Flexible Droit » regroupe justement plusieurs articles de Jean Carbonnier concernant la sociologie du droit. Ces articles sont indépendants les uns des autres et ils ont été rédigés à différentes époques. Ils ont été concentrés dans ce livre et organisés avec un véritable plan afin de regrouper les différentes thématiques et de donner une cohérence à l’ensemble.
Le troisième livre, et donc le troisième auteur, que je souhaite vous présenter s’intitule « Des délits et des peines ». Il a été rédigé par Cesare Beccaria. Beccaria était un philosophe. Ce livre a été publié en 1764. A cette époque la justice était particulièrement cruelle, la torture était omniprésente et la peine de mort était fréquente.
Cesare Beccaria avec cet ouvrage livre une véritable contestation contre le système judiciaire tel qu’il existait alors. Avec ce texte il a dénoncé les peines qui était cruelles, dont la torture et la peine de mort. Il désirait que les peines arbitraires disparaissent et qu’elles soient remplacées par des peines légales. Il souhaitait également que les peines soient utilitaires. Pou lui les peines doivent favoriser la réinsertion et elles doivent être proportionnées à l’infraction commise. Ces idées peuvent sembler normale à notre époque mais à l’époque de Beccaria elles étaient complètement révolutionnaires.
Pour aller plus loin :
La thèse d’Henri Motulsky : « Principes d’une réalisation méthodique du droit privé – La théorie des éléments générateurs des droits subjectifs ».
Le livre de Jean Carbonnier : « Flexible Droit ».
Le livre de Cesare Beccaria : « Des délits et des peines ».