Aujourd’hui, je veux aborder un sujet particulièrement sensible et complexe : le mensonge sur le genre dans une relation de couple. Il y a quelques semaines, Eric Talk About a publiĂ© une vidĂ©o oĂą il abordait un cas spĂ©cifique : une femme, nĂ©e dans un autre sexe, annonce Ă son compagnon qu’elle a subi des opĂ©rations pour devenir la femme qu’elle est aujourd’hui. Cette rĂ©vĂ©lation a conduit Ă la rupture du couple, et Eric a exprimĂ© son opinion sur la question.
Dans cette vidĂ©o, Eric a Ă©voquĂ© une forme de tromperie, qualifiant la situation de quasiment un viol en raison du manque de transparence sur le genre de naissance. Son raisonnement repose principalement sur son ressenti et sa dĂ©duction personnelle. Aujourd’hui, je veux complĂ©ter ses propos en apportant une perspective juridique plus approfondie sur cette question.
La position d’Eric Talk About
Pour rĂ©sumer les propos d’Eric, il estime que si la vĂ©ritĂ© avait Ă©tĂ© dite dès le dĂ©part, la relation physique n’aurait probablement pas eu lieu. Selon lui, cela constitue une tromperie qui s’apparente Ă un viol, bien qu’il ait utilisĂ© le terme « quasiment » pour laisser une certaine marge d’interprĂ©tation.
Il est important de noter que cette conclusion est principalement basĂ©e sur son ressenti, mais aussi sur une interprĂ©tation logique des faits. Cependant, pour rĂ©ellement comprendre les implications de cette situation, il est essentiel d’examiner les aspects juridiques qui entourent cette question.
Le cadre juridique : l’article 222-23 du code pénal
En France, l’article 222-23 du Code pĂ©nal dĂ©finit le viol comme « tout acte de pĂ©nĂ©tration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. » Ici, c’est le terme « surprise » qui mĂ©rite notre attention. Mais comment cette notion de surprise pourrait-elle s’appliquer Ă une situation oĂą l’une des personnes a menti sur son genre de naissance ?
Analyse juridique : la notion de surprise
Dans un article publiĂ© sur le site Village de la Justice, MaĂ®tre Avi Bitton et Julie Palayer, juriste, abordent diffĂ©rentes hypothèses concernant l’application de la notion de surprise dans des affaires de viol. L’un des cas Ă©voquĂ©s concerne une situation oĂą l’individu utilise une ruse ou un stratagème pour tromper la victime. Cela semble très pertinent pour le cas discutĂ© par Eric.
L’exemple classique en jurisprudence est celui d’un homme d’un certain âge se faisant passer pour plus jeune sur Internet. Lors de la rencontre, il demandait aux victimes de se bander les yeux pour cacher son vĂ©ritable âge. Dans un arrĂŞt du 23 janvier 2019, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a jugĂ© que « l’emploi d’un stratagème destinĂ© Ă dissimuler l’identitĂ© et les caractĂ©ristiques physiques de son auteur pour surprendre le consentement d’une personne constitue la surprise ».
Cette jurisprudence pourrait Ă mon sens s’appliquer au cas oĂą une personne dissimule son genre de naissance. Il y a lĂ un stratagème et une dissimulation de l’identitĂ© et des caractĂ©ristiques physiques rĂ©elles de la personne qui sont cachĂ©s par une multitude d’opĂ©rations chirurgicales et de produits divers.
Les conclusions de l’avocat gĂ©nĂ©ral
Il est Ă©galement intĂ©ressant de se pencher sur les conclusions de l’avocat gĂ©nĂ©ral dans l’affaire citĂ©e prĂ©cĂ©demment. En page 5 de son rapport, il mentionne un extrait du « Droit pĂ©nal spĂ©cial » de Malabat, affirmant que « le consentement surpris est celui qui est donnĂ©, Ă la diffĂ©rence du consentement forcĂ© par la violence, la contrainte ou la menace, mais qui n’est pas donnĂ© en connaissance de cause, qui manque de luciditĂ©. »
Cette dĂ©finition pourrait très bien s’appliquer Ă une situation oĂą une personne est trompĂ©e sur le genre de naissance de son partenaire. Si l’une des parties n’a pas toutes les informations nĂ©cessaires pour donner son consentement Ă©clairĂ©, peut-on dire que ce consentement est valide ? Selon l’avocat gĂ©nĂ©ral, la rĂ©ponse pourrait bien ĂŞtre non.
La position de Michèle Laure Rassat
Une autre rĂ©fĂ©rence juridique intĂ©ressante est celle de Michèle Laure Rassat, citĂ©e dans le « JurisClasseur PĂ©nal ». Elle identifie la surprise par tromperie comme une situation oĂą « le dĂ©faut de consentement rĂ©sulte de l’utilisation de stratagèmes ou de la construction d’un engrenage, par lesquels l’auteur des faits a crĂ©Ă© des conditions de nature Ă tromper les victimes sur la situation exacte. »
Rassat définit la surprise comme « le fait d’obtenir des relations sexuelles en trompant la victime sur la situation réelle ou en abusant de sa difficulté à appréhender celle-ci. »
La aussi, ces éléments semblent parfaitement convenir à la situation présente.
Ainsi, il semble que les propos d’Eric Talk About soient en accord avec les analyses juridiques. En effet, si une personne ment sur son genre de naissance et que cette tromperie conduit Ă une relation physique, cela pourrait ĂŞtre considĂ©rĂ©, en France, comme un viol par surprise. Cependant, cela dĂ©pendrait fortement de l’interprĂ©tation du juge, qui pourrait ĂŞtre influencĂ©e par ses propres convictions ou idĂ©ologies, une bonne partie d’entre eux Ă©tant progressistes.
En tout cas, cette situation montre Ă quel point la question du consentement est complexe et doit ĂŞtre abordĂ©e avec soin. Le mensonge sur le genre de naissance n’est pas seulement une question de morale, mais pourrait avoir de sĂ©rieuses implications juridiques.
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